dimanche 16 septembre 2007

IMMIGRATION • Le test de la honte

Une nouvelle gifle française

Ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale en France avant-hier, mercredi 12 septembre va certainement faire grand bruit et créer, pour l'histoire, un fâcheux précédent.

En effet, dans le cadre de la lutte engagée désormais de manière permanente par le gouvernement français contre l'immigration clandestine à travers toutes ses variantes, un député du parti majoritaire, l'UMP, a fait adopter par la commission des lois de l'Assemblée nationale un amendement autorisant " le recours aux tests ADN pour authentifier les filiations lors de la délivrance des visas de plus de trois mois. "

En d'autres termes, dans les demandes de visas pour les regroupements familiaux dont les conditions avaient déjà fait l'objet de nombreuses restrictions, il ne suffira plus pour le demandeur qui respecte les conditions de séjour et de confort des revenus de présenter des documents officiels établissant sa filiation avec les membres qu'il souhaite regrouper autour de lui. Il faudra qu'en plus, il passe par l'utilisation des tests génétiques pour prouver qu'il s'agit bien de membres de la famille, et qu'ils sont bien unis par le sang.

A l'origine de ce nouvel artifice juridique, une étude publiée en juin dernier par un autre député de la droite française, et qui met ouvertement en cause l'authenticité de certains actes officiels d'état civil fournis par les familles venant de pays africains, les plus cités étant le Sénégal, la Côte d'Ivoire, les deux Congo, le Togo, Madagascar ou les Comores... Désormais donc, la simple présentation de ces documents, fussent-ils officiels, ne suffira plus.

Le gouvernement français de droite, qui a décidé de rattraper l'électorat du Front national de Jean Marie Le Pen, ne recule donc plus devant rien pour faire reculer les chiffres de l'immigration, allant même jusqu'à inciter les préfets à traquer dans les rues de France tous les " étrangers " aux allures douteuses (en réalité les Africains, encore), pour augmenter le nombre de refoulés et atteindre rapidement la barre des 25.000 annoncée comme objectif pendant la campagne électorale d'avril dernier.

On ne peut pas nier, même en regardant ce qui se passe au Cameroun dans la plupart des demandes de visas (courts ou longs séjours), que certains des documents présentés soient souvent " fabriqués " dans des " officines " qui se sont spécialisées dans la production de " papiers clés en main " et qui se remplissent les poches devant le désir irréfragable de beaucoup de jeunes d'aller tenter l'aventure en Europe.

Mais, comme s'insurgent le Cran (Conseil Représentatif des Associations Noires, fondé le 26 novembre 2005, et qui rassemble aujourd'hui, plus de 120 associations, petites et grandes) et quelques membres de l'opposition française, la lutte contre l'immigration clandestine peut-elle justifier l'utilisation de moyens contraires à l'éthique et à la morale ?

Ce qu'on rappelle volontiers en effet, c'est que les tests génétiques de filiation sont strictement encadrés par la loi : en vertu de l'article 16 du code civil français, " l'étude génétique des caractéristiques d'une personne ne peut être entreprise qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique ".

La mesure, on s'en doute, vise presque exclusivement les Africains. Coupables de toutes sortes de turpitudes, et priés de rester chez eux par tous les moyens. C'est sans doute l'épilogue logique du discours de Nicolas Sarkozy le 26 juillet dernier à Dakar, où il demandait presque ouvertement aux jeunes Africains de rester chez eux et d'organiser s'ils le veulent, des soulèvements contre leurs dirigeants. Mais d'arrêter d'aller déranger des Européens repus qui n'aspirent qu'à se reposer.

Mais quel sens donneront les dirigeants africains à cette nouvelle gifle française et quelles réactions auront-ils, eux qui auront été incapable d'encadrer leur jeunesse et de lui offrir des pistes d'espoir ?

La LDH et la Cimade s'insurgent

Le secrétaire général de la Cimade, Laurent Giovannoni, s'est ainsi déclaré "scandalisé". "Je suis scandalisé que ce type d'amendement soit adopté en commission des lois alors qu'il s'agit d'un changement si profond et qui touche directement l'éthique même de la façon dont on aborde l'accueil des familles", a-t-il lancé à l'AFP. "Sur le fond, c'est tout à fait inadmissible".
"C'est aussi une remise en cause des documents d'état civil, la signification que la France ne donne aucun crédit aux documents fournis par les pays d'origine. Cela peut aussi avoir des conséquences fâcheuses sur le plan diplomatique", a-t-il ajouté.
Laurent Giovannoni a dit "espérer que le gouvernement s'opposerait à cet amendement".

De son côté, le président de la Ligue des droits de l'homme (LDH), Jean-Pierre Dubois, a stigmatisé une "nouvelle étape vers la rupture avec la République". "C'est un amendement profondément discriminatoire et même xénophobe car il y a là une véritable peur de l'étranger", a-t-il encore indiqué.

«Accueillir toute la misère du monde ?» Le président de la ligue des droits de l’homme française, Jean-Pierre Dubois, et Richard Cazenave, ancien député UMP, ont abordé vendredi matin le thème du codéveloppement.

Ce projet représente "une escalade inacceptable", a pour sa part estimé la députée PS George Pau-Langevin. "C'est un pas significatif et inacceptable dans l'atteinte à la vie privée et familiale, qui est hors de proportion avec le but affiché de lutter contre la fraude documentaire", a déclaré George Pau-Langevin dans les couloirs de l'Assemblée nationale.
"Est-ce que l'on envisagerait de faire ça pour des Français?", s'est interrogée l'élue du XXe
arrondissement de Paris.

Le ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du codéveloppement, Brice Hortefeux, a quant à lui déclaré qu'aucun sujet ne devait être "tabou". "Je crois qu'aucun sujet ne doit être tabou. A un moment où l'on parle de revalorisation du rôle du Parlement, il me paraît utile et sain que les parlementaires puissent se saisir du sujet pour en débattre", a déclaré Brice Hortefeux.
"Il y a aujourd'hui onze pays européens qui pratiquent déjà (le test ADN)", a-t-il ajouté, soulignant que "ces tests seront proposés à des volontaires et non imposés".

"Cette procédure ne pourrait être mise en œuvre qu'à l'initiative d'un demandeur désireux de prouver sa bonne foi le plus rapidement possible", avait affirmé mercredi soir le député UMP Thierry Mariani, auteur de l'amendement. Selon lui, la procédure serait "sûre et rapide".

L'amendement a suscité de vifs débats au sein de la commission de lois. Les socialistes ont mis en doute la possibilité de réaliser de tels tests ADN dans les pays d'origine, et ont également soulevé la question des enfants adoptés ou recueillis.
Plusieurs députés UMP, notamment François Goulard et Etienne Pinte, ont eux aussi critiqué cet
amendement et ont voté contre. François Goulard a mis en avant des obstacles, tandis qu'Etienne Pinte s'est interrogé sur l'opportunité d'appliquer à des ressortissants étrangers des tests qui ne sont autorisés en France que sur décision judiciaire.

Jean-Marie Le Pen approuve

Jean-Marie Le Pen, président du Front national, a approuvé vendredi 14 septembre sur LCI l'amendement au projet de loi sur l'immigration qui autorise le recours aux tests ADN dans le cadre du regroupement familial pour prouver sa filiation.
"Tous les moyens d'identification sont bons", a en effet estimé le leader d'extrême droite.

Revenant plus généralement sur la politique d'immigration de l'actuel gouvernement, il a en revanche estimé qu'il s'agissait de "poudre aux yeux". Selon le dirigeant du FN, le gouvernement prévoit "25.000 expulsions alors que le chiffre officiel d'entrées de clandestins est entre 150.000 et 400.000".
"Il faut empêcher les gens d'entrer, les dissuader de venir", a-t-il ajouté.

1 commentaire:

Michèle a dit…

Simple test de mise en relation avec ton blog...@bientôt