vendredi 31 août 2007

Suède • l'Iran et le Pakistan protestent contre de nouvelles caricatures du Prophète

Une caricature de l'artiste suédois Lars Vilks représensant le prophète Mahomet avec un corps de chien a été publiée le 18 août dernier par le journal suédois Nerikes Allehanda à Örebro (centre de la Suède).
Ce dessin était destiné ­- après le refus de plusieurs galeries d'art suédoises d’exposer une série de dessins - à accompagner un éditorial sur l'autocensure et la liberté de religion. Il faut bien l'avouer, la caricature n'est pas du meilleur goût, et a été choisie en préférence à une autre, d'un goût tout aussi incertain, et représentant Jésus, avec cette fois-ci un corps d'éléphant...

Cet éditorial critiquait le fait que les dessins de Vilks avaient été rejetés « de peur des réactions qu'ils pourraient provoquer », a déclaré le rédacteur en chef du Nerikes Allehanda, Ulf Johansson.

Le Pakistan a convoqué jeudi 30 août un diplomate suédois Lennart Holst à Islamabad pour protester contre cette caricature jugée « blasphématoire » du prophète Mahomet
« Le chargé d'affaires suédois a été informé que la publication de la caricature avait profondément offensé les sentiments religieux des musulmans », poursuit le texte.

Caricature de Mahomet

Le diplomate suédois a déclaré que Stockholm « partageait pleinement le point de vue de la communauté musulmane » et a qualifié la publication de la caricature de «malheureuse », affirme le communiqué tout en ajoutant que « le gouvernement suédois ne pouvait pas se mêler de la liberté de la presse ».
« C'est de l'art (...) Je ne suis pas contre l'Islam. Tout le monde le sait », a affirmé par ailleurs l'artiste Lars Vilks.


caricature de Jésus

L'Iran avait déjà protesté lundi 27 août contre cette même caricature en convoquant le chargé d'affaires suédois à Téhéran.

Cette affaire intervient à peine deux ans après celle des caricatures de Mahomet publiées en septembre 2005 par le plus grand quotidien danois, Jyllands-Posten, qui avaient soulevé en janvier et février 2006 de violentes protestations dans le monde musulman et entraîné un boycottage des produits danois.

Il est « regrettable » de constater que « la tendance de certains Européens à mélanger la liberté d'expression et l'insulte directe et délibérée de quelque 1,3 milliard de musulmans dans le monde est en hausse » déclare le ministère pakistanais.
Islamabad annonce en outre qu'il va mener des consultations avec les 57 membres de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) sur des actions futures « contre la répétition de telles publications provocatrices »
Le secrétaire général de l'OCI, Ekmeleddin Ihsanoglu, a lui aussi condamné dans un communiqué la publication de cette caricature qualifiée de « blasphématoire » et demandé au gouvernement suédois de punir le dessinateur et le journal en cause, avant d'exiger des excuses de Stockholm.
« C'était un acte irresponsable et méprisable, ayant des intentions mauvaises et provocatrices au nom de la soi-disant liberté d'expression. Il avait pour seul but d'insulter les musulmans et d'attiser leurs sentiments » écrit M. Ihsanoglu, tout en appelant les fidèles au calme et à la retenue.


Panorama sur le centre historique de Stockholm

jeudi 30 août 2007

Pékin • une police virtuelle pour surveiller Internet


La censure prend désormais l’apparence de deux gentils policiers du Net


Ils ont d’énormes yeux bleus sous leur képi, des épaulettes comme des petites ailes, et ils surfent à travers votre écran. On les voit aussi en moto ou en voiture pourchassant les «activités illégales» qui «polluent Internet». Ces personnages de style manga sont Jingjing et Chacha (Popo et Lilice), le couple de cyberpoliciers qui arpentent le Net chinois. Ils sont apparus au début de l’année sur les principaux portails et forums de discussion du sud du pays, et vont prendre leurs fonctions sur les sites basés à Pékin dès ce week-end. Puis dans tout le pays. La presse officielle annonce fièrement : «Internautes, la police virtuelle vous regarde. » Cette police peut aussi recueillir les délations du public. Les cyberpoliciers sont en effet interactifs et «ouverts à toute dénonciation» . En cliquant dessus, on accède à des liens permettant d’avertir la police en cas de contenu pornographique, d’appel à la sécession ou tout autre «trouble à l’ordre public».

Emanation visible de la cyberpolice chinoise en fonction depuis le début des années 2000, les deux personnages illustrent bien les inquiétudes des autorités face au développement du Web chinois. Avec près de 150 millions d’internautes, un bon million de sites, et plus de soixante millions de blogs locaux, il est devenu de plus en plus difficile pour le régime de tout contrôler. Par cette présence visible, il s’agit d’encourager l’autocensure.

Téléphone "purifié"

Une grande campagne de reprise en main d’Internet vise ainsi les blogs et les forums de discussion où sont publiées la plupart des «informations nuisibles», ainsi que les moteurs de recherche pouvant mener à un «contenu subversif». Les réseaux téléphoniques mobiles doivent aussi être «purifiés» de tout ce qui est considéré comme illégal. Des centaines de blogs et de sites ont été fermés ces trois dernières années pour leur contenu politique, et Reporters sans frontières dénombre cinquante personnes actuellement emprisonnées pour avoir «porté atteinte à la sécurité de l’Etat».

Yahoo contre-attaque

Comme les hébergeurs chinois, les grandes compagnies occidentales qui gèrent des blogs ou espaces locaux se sont aussi pliées de bonne grâce aux demandes de la cyberpolice chinoise. Google, Yahoo et MSN ont déjà accepté de faire disparaître de leurs portails en chinois tout ce qui dérangeait le régime . Et la semaine dernière, plusieurs grands hébergeurs occidentaux opérant en Chine dont Yahoo et MSN ont signé un code de conduite visant à «protéger les intérêts de l’Etat chinois» et à ne pas diffuser de «messages illégaux» . Le cas des cyberdissidents Shi Tao et Wang Xiaoning a mis en évidence les méfaits de cette collaboration des hébergeurs occidentaux. Condamnés en 2003 et 2005 à de lourdes peines de prison - jusqu’à dix ans - pour avoir fait circuler sur Internet des écrits pro-démocratiques, ils avaient été arrêtés grâce aux informations fournies par Yahoo aux autorités chinoises. Depuis, un procès a été intenté par les familles des victimes à la société californienne devant une cour américaine. Mais aujourd’hui, Yahoo contre-attaque en arguant qu’il s’agit d’un cas politique, et qu’elle avait signé un accord l’obligeant à se plier aux lois chinoises. «En utilisant Yahoo, les plaignants doivent assumer le risque que nous divulguions le contenu de leurs e-mails aux autorités» , vient de déclarer un porte-parole de l’entreprise, ajoutant que le vrai scandale viendrait des «plaignants, qui savaient à quoi ils s’exposaient».



Les obstacles ne manquent pas à Pékin



Le 8 août 2008 débuteront en Chine les Jeux olympiques. Plusieurs délégations ont manifesté leur inquiétude face au risque que représente la pollution de l'air dans la capitale chinoise. Les autorités locales se veulent rassurantes, expliquant que de nombreuses mesures seront adoptées au cours des prochains moins pour offrir un air sain aux athlètes en compétition.



Nouvelle épreuve de haies aux Jeux olympiques
(dessin de Corrigan paru dans The Toronto Star de Toronto)

mercredi 29 août 2007

TURQUIE • Abdullah Gül le républicain laïque



E
lu président de la Turquie, mardi 28 août, à l'issue d'un troisième tour de scrutin au parlement d'Ankara, l'ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Gül s'est engagé à défendre la laïcité républicaine en chef d'Etat impartial, montrant ainsi le souci d'apaiser les tensions intérieures.




Abdullah Gül est le premier dirigeant issu de la mouvance islamiste à accéder à la présidence de la Turquie, pays à forte majorité musulmane où l'armée se pose en gardienne du système laïque.

Le général Yasar Büyükanit, chef d'état-major des forces armées, a accusé lundi des "centres du mal" de chercher à détruire la république laïque, laissant ainsi entendre que les militaires ne resteraient pas passifs au cas où le principe de la séparation de l'Etat et de la religion leur semblerait menacé.
"Abdullah Gül, ayant obtenu la majorité absolue au troisième tour, est élu 11e président de la Turquie avec 339 voix", a annoncé le président du Parlement, Koksal Toptan.

Liberté de culte

Le troisième tour de scrutin se décidait à la majorité simple, alors que la majorité des deux tiers était requise lors des deux premiers. Le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir occupe 341 sièges sur 550. Deux autres candidats briguaient aussi la présidence de la République.
"Tant que je serai en fonctions, je rassemblerai tous nos concitoyens sans aucun préjugé", a déclaré le président élu dans son discours inaugural après avoir prêté serment.
Il a promis de défendre les principes de la laïcité, en notant qu'ils garantissaient aussi la liberté de culte, et a également dit que la Turquie devait poursuivre ses efforts sur la voie d'une adhésion à l'Union européenne.

Symbole religieux

Abdullah Gül, diplomate dont la réputation s'est solidement établie depuis la victoire électorale de l'AKP en 2002, a contribué à l'ouverture de pourparlers d'adhésion avec l'UE.
Il entend parler au nom de tous les Turcs mais inspire de fortes réserves à l'armée, qui soupçonne l'AKP de nourrir secrètement un programme islamiste.
Nombre d'observateurs pensent toutefois que Abdullah Gül, qui a rompu en 1999 avec un parti islamiste, s'emploiera à éviter une épreuve de force.
"Il ne faut pas s'attendre à des initiatives radicales avec un président comme Gül. Ses adversaires, qui craignent cela de lui, seront surpris, et ceux de ses partisans qui tablent sur des mesures radicales seront déçus", selon l'universitaire Cengiz Candar.
La Commission et le Parlement de l'Union européenne ont salué l'élection de Abdullah Gül en la jugeant propre à redynamiser les pourparlers entre la Turquie et l'UE. "Un nouveau gouvernement va arriver au pouvoir et pourra reprendre le travail avec un mandat populaire clair", a noté José Manuel Barroso, président de la Commission.

Nouveau
cabinet

Le Premier ministre Tayyip Erdogan a indiqué qu'il soumettrait mercredi son nouveau cabinet à l'approbation du président élu. On s'attend à ce que le gouvernement accentue sa politique de réformes politiques et économiques.
L'élite laïque et les généraux turcs, qui ont renversé quatre gouvernements depuis 1960, se méfient du passé islamiste de Abdullah Gül et s'inquiètent notamment de voir son épouse porter le foulard islamique au palais présidentiel de Cankaya.
Le foulard islamique est pour beaucoup un symbole provocant de l'influence religieuse éradiquée de la vie publique par Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la république moderne édifiée sur les ruines de l'empire ottoman.

Manifestation

"Ma mère n'ira pas (au Parlement)", a déclaré le fils de Gül, Mehmet Emre, selon l'agence anatolienne de presse. Propos qui laissent penser que l'épouse du nouveau président, Hayrunnisa, cherche à éviter la controverse.
Mais selon un sondage réalisé pour le journal Milliyet, 72,6% des personnes consultées jugent normal que l'épouse du président porte un foulard de tête, contre 19,8% qui en seraient gênées.

Manifestation pour la défense de la laïcité en mai 2007

Par contraste avec les cérémonies d'investiture passées, le Parti républicain du peuple (CHP), première formation d'opposition, la haute hiérarchie militaire et une partie de l'élite laïque ont boycotté la prestation de serment de Gül.
Quelques centaines de partisans de la laïcité ont protesté devant le palais de Cankaya, placé sous haute surveillance, au cri de "la Turquie est laïque et le restera".
A Kayseri, ville natale du 11e président de la République turque, des milliers de personnes sont en revanche descendues dans la rue pour manifester leur joie.

Marché financiers

Quant aux marchés financiers, ils ont été malmenés par la faiblesse des places mondiales et la mise en en garde de l'armée. La livre turque n'a en revanche guère bougé après le vote du nouveau président de la République, reculant à 1,3290 pour un dollar.
La première tentative d'élection de Gül à la présidence avait été contrecarrée par l'opposition laïque en avril. La crise politique qui avait suivi a débouché sur des élections législatives remportées haut la main par l'AKP.
A Washington, le département d'Etat a salué mardi un "exercice de démocratie" favorisant le développement de la vie publique turque sur ce terrain.
L'accession de Gül à la tête de l'Etat parachève la conquête par l'AKP des postes clés de la hiérarchie politique turque.

mardi 28 août 2007

TURQUIE • Un ex-islamiste, bientôt président



Le ministre des Affaires étrangères,
Abdullah Gül (voir photo avec son épouse) devrait être élu Président de la république. Son passé islamiste et la personnalité de sa femme, qui porte le voile, inquiétent l'opposition.




Le candidat du Premier ministre Erdohan divise la société turque. Gül, reconverti sincère ou imposteur ? La réponse de l'éditorialiste Murat Yetkin : " Si Gül tient ses promesses, en particulier celle sur le caractère séculaire de la démocratie turque, alors il ne devrait y avoir aucune tension".

Reste qu'hier, l'armée, garante de la laïcité, est à nouveau intervenue pour réaffirmer son devoir de protection à l'égard de la république turque. Les forces armées avaient déjà menacé d'intervenir au printemps. Abdullah Gül avait fait une première tentative pour accéder au poste suprême. Des manifestations géantes pour la défense de la laïcité avaient secoué le pays. Ce qui n'a pas empêché l'AKP de remporter les législatives anticipées du mois dernier.
L'AKP dément vouloir remettre en cause la laïcité et Abdullah Gül a promis à plusieurs reprises de défendre le principe de la séparation de l'Etat et de la religion

Photo du Premier ministre Erdohan et de sa femme

Hayrünnisa Gül ne lache pas le voile

Lasse des polémiques, Hayrünnisa Gül lança récemment excédée : «Mon voile recouvre ma tête, pas mon cerveau.» Très probable prochaine first lady de Turquie, Hayrünnisa Gül, 42 ans, épouse d’Abdullah Gül , sera la toute première dame à porter le turban au Palais présidentiel à Ankara. C’est devenu une affaire d’Etat dans un pays où le voile islamique est banni des administrations comme des universités. Il est également interdit aux femmes des officiers ; or le chef de l’Etat est aussi le chef suprême des armées.

Un des moyens de contourner la difficulté serait de «relooker» la première dame avec un foulard moins chargé de symbole que le «turban», comme les Turcs appellent le voile islamiste. «Je vais réaliser une petite révolution. Je m’inspire des photos de Romy Schneider, de Catherine Deneuve et de Sophia Loren avec des voiles», a lancé le styliste Atıl Kutoglu, installé à Vienne, qui se dit «kémaliste» mais affirme «respecter les choix vestimentaires de Mme Gül». Cela n’a pas suffi à rasséréner l’armée, soutenue par la principale formation de l’opposition parlementaire, le Parti républicain du peuple (CHP, 20,7 % des voix) et les partisans de la laïcité. Abdullah Gül rétorque que le voile porté par sa femme «est un choix personnel». Mais le chef d’état-major de l’armée, le général Yasar Büyükanit, rappelait au printemps, lors de la première candidature de Gül à la présidence, qu’il fallait «un président respectant les principes de la Constitution et la laïcité, pas seulement en parole».

Mère de trois enfants, Mme Gül, est devenue ainsi un des sujets favoris des caricaturistes. L’hebdomadaire satirique Leman , très populaire au sein de la jeunesse, la montre en «Playboy girl», pour se moquer du «turban moderne». Intellectuels et universitaires libéraux défendent publiquement «la liberté de choix» et soutiennent Mme Gül.

La femme du futur président n’en est pas moins une militante convaincue du foulard. Empêchée de s’inscrire en Lettres arabe à l’université d’Ankara pour son refus de présenter une photo d’identité tête nue, elle a intenté, en 2002, un procès contre la Turquie devant la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg. Elle a retiré sa plainte en 2004 quand son époux est devenu ministre des Affaires étrangères. Les relations entre le futur président de la République et le camp laïc ainsi que les militaires s’annoncent déjà difficiles. Le CHP a déclaré qu’il boycottera l’ensemble des activités et des cérémonies de la présidence de la République.

lundi 27 août 2007

Elections au Maroc • Les islamistes partent favoris


Les islamistes marocains du Parti Justice et Développement (PJD) se sont déclarés convaincus dimanche d'arriver en tête des élections législatives du 7 septembre au Maroc.

"Le PJD sera le premier dans ces élections", a lancé dimanche le secrétaire général du mouvement, Saâd Eddine Othmani, devant quelque cinq cents militants enthousiastes qui participaient au premier meeting de la campagne à Casablanca, la capitale économique du Royaume.

"Nous comptons avoir un million de voix et un peu plus de 70 sièges. Normalement, on doit être le premier parti", a-t-il ensuite précisé lors d'un point de presse.

Des sondages non officiels réalisés avant le début de la campagne donnent le PJD gagnant en nombre voix et ses dirigeants espèrent obtenir 70 à 80 députés sur un total de 325. En 2002, ils avaient enlevé 42 sièges, arrivant après les socialistes de l'USFP et le parti nationaliste Istiqlal.

M. Othmani a présenté la lutte contre la corruption comme le thème central de la campagne et appelé ses militants "à la mobilisation générale contre ce fléau".

"Notre campagne sera propre, transparente et respectueuse de la loi", a-t-il lancé avant d'ajouter: "construisons ensemble le Maroc de la justice. Tel est le mot d'ordre de notre campagne".

"Plus de sérieux, d'honnêteté, de transparence: c'est la valeur ajoutée du PJD s'il dirige le gouvernement. Ce qui va changer, c'est le mode de gestion. Nous visons une justice indépendante, non corrompue, équitable et moderne", a ajouté le secrétaire général du PJD lors du point de presse.

Dans la salle de sports où se tenait la réunion, les hommes et les femmes, qui portaient quasiment toutes le foulard, étaient séparés. Le public brandissait des drapeaux du Maroc et des fanions frappés d'une lanterne, le signe traditionnel utilisé par le PJD pour les élections.

Les murs étaient recouverts de banderoles ou l'on pouvait lire notamment "Authenticité, justice et développement".

M. Othmani a assuré que le programme de sa formation était basé sur "le référentiel islamique et le choix démocratique".

Interrogé sur ce programme, qui propose de placer la "charia comme source principale de la juridiction" au Maroc, il a expliqué que le PJD "réclamait, comme d'autres l'avaient fait avant lui, d'inscrire cette demande dans la Constitution. Il n'y a rien de nouveau", a-t-il précisé.

Préparant l'après-élection avec l'espoir de pouvoir faire partie de l'exécutif, M. Othmani a "tendu la main" aux autres formations politiques. "Nous croyons à la coopération et nous avons déjà travaillé ensemble pour gérer des communes notamment à Rabat, Fès Meknès et Témara".

dimanche 26 août 2007

Parti Socialiste • Sarkozy et la régression africaine

Rupture il y aurait ! Promettait Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle.
En mai 2006, le candidat avait donné à Cotonou quelques gages prometteurs, en s’engageant à promouvoir « la bonne gouvernance», ou encore « la démocratie [qui], ne se résume pas à des élections, à « bâtir un état de droit, où l’administration est neutre, les circuits financiers transparents, où la presse est à la fois responsable et indépendante, où l’autorité judiciaire est libre de travailler sans influence extérieure ».


On ne pouvait alors que se réjouir de l’engagement du candidat à refuser « de transiger sur ses valeurs. Ces valeurs de démocratie, de respect des droits de l’homme, de bonne gouvernance (…), ces principes [qui] ne s’arrêtent pas aux portes du continent ! »
On attendait avec une impatience non dissimulée la fermeture de l’anachronique ère chiraquienne. Nicolas Sarkozy les a déjà déçus.

En dehors des avancées sur l’affaire Borrel, qu’il faut saluer, la présidence Sarkozy s’est pour l’essentiel inscrite dans la « droite ligne » de la présidence Chirac, parvenant même à régresser encore sur plusieurs aspects. D’abord, les 0,7% d’aide au développement promis par la majorité UMP sortante attendront 2015, a-t-on appris. Autant dire les calendes grecques.

Pendant ce temps là, l’effort français de solidarité baisse ! Et puisqu’il faut bien faire diversion, le Président Sarkozy prolonge la méthode adoptée par son prédécesseur, en privilégiant les annulations de dette à d’autres formes d’aide au développement. Par générosité ? Pas si sûr.

Cette technique permet surtout à la France de déclarer à l’OCDE des chiffres d’aide au développement supérieurs à leur coût budgétaire, par des jeux d’écriture comptables contestables. C’est la politique du « Annuler plus pour afficher plus ». Evidemment, on se réjouirait de la poursuite des annulations de dette si celles-ci étaient additionnelles à une hausse de l’aide. Mais dans la mesure où celle-ci régresse, c’est bien d’un écran de fumée qu’il s’agit là.


Le Gabon, pays phare de la diplomatie sarkozienne, devrait être le premier à bénéficier des largesses de l’Elysée, à des conditions qui rendront jaloux bien des pays en développement.
Bref, les réseaux chiraquiens se portent bien. Omar Bongo Ondimba (voir photo) , Denis Sassou Nguesso, Idriss Déby Itno restent les interlocuteurs privilégiés de l’Elysée, au grand dam de ceux qui auraient aimé voir la France intensifier ses relations avec des Etats incarnant mieux lesdites valeurs de « transparence, de démocratie et de bonne gouvernance… »

Nicolas Sarkozy avait pourtant donné un bref signal de modernisation en accordant à Ellen Johnson Sirleaf l’honneur d’être le premier chef d’Etat africain reçu à l’Elysée ! Le rappel à l’ordre des habitués de la Françafrique fut rapide, et fidèlement exécuté… Instamment prié de modifier sa tournée africaine pour s’arrêter au Gabon, notre Président se plia aux injonctions du doyen des chefs d’Etats. Il nous promettait des surprises, on ne peut pas dire qu’en s’arrêtant au Sénégal et au Gabon il nous ait retournés d’étonnement.

Puis vint le discours de Dakar, qui a tant heurté en Afrique.
C’est d’abord cette insistance lourde sur la nature et la souffrance de l’homme noir. Invoqué six fois. Puis ces généralités, d’abord gênantes, choquantes ensuite, sur l’homme africain. Citons Sarkozy « le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. (…) Le paysan africain, qui depuis des millénaires, (…) ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. » L’homme africain pas entré dans l’histoire ? Dire cela dans les murs de l’université Cheikh Anta Diop ne manque pas de sel. Surtout dans une déclaration qui fleure bon le XIXème siècle, semblant paraphraser Hugo, Hegel, voire Jules Ferry, pour leurs écrits les moins mémorables. Dans le même ordre de généralités avilissantes, on apprend aussi que « l’homme moderne qui éprouve le besoin de se réconcilier avec la nature a beaucoup à apprendre de l’homme africain qui vit en symbiose avec la nature depuis des millénaires».

Faut-il aussi en conclure que l’homme africain n’est pas moderne ? C’est bien ce que laisse entendre le discours de Dakar. Puis, c’est le summum, avec ces mots qui gravent dans le marbre l’infantilisme ou l’irrationalité supposés de l’homme africain : «L’Afrique a réveillé (…) ce besoin, ce besoin auquel je crois moi-même tant, de croire plutôt que de comprendre, ce besoin de ressentir plutôt que de raisonner ».

Pauvre Afrique, terre des sentiments, à défaut de raison.
Enfin, car cela aurait manqué, il fallait un couplet sur le colonisateur, dont le président Sarkozy nous dit que certes « il a pris » mais « qu’il a aussi donné. » Ainsi, « il y avait parmi [les colonisateurs] des hommes mauvais mais il y avait aussi des hommes de bonne volonté(…). Ils se trompaient mais certains étaient sincères. » Plus loin : « La civilisation musulmane, la chrétienté, la colonisation, au-delà des crimes et des fautes qui furent commises en leur nom et qui ne sont pas excusables, ont ouvert les cœurs et les mentalités africaines à l’universel et à l’histoire. » Pauvres hommes noirs vivant avant la colonisation et l’esclavage, ignorants et refermés sur eux-mêmes…
Le plus grave, c’est que le Président Sarkozy, s’égarant dans des considérations dégradantes, esquive les sujets prioritaires. Que pense-t-il des Accords de partenariat économique, qui redéfiniront les modalités de la coopération européenne avec les pays ACP ? La situation est grave : leur négociation à marche forcée provoque déjà la colère et l’incompréhension d’une majorité de pays africains, soutenus par nombre d’organisations de la société civile du Nord comme du Sud. Un effort budgétaire sera-t-il fait pour permettre à l’aide au développement française de ne pas chuter, dans un contexte de finances publiques dégradées par le coût inconsidéré du paquet fiscal ? Que compte faire le Président de la République des bases militaires françaises en Afrique, ou encore des accords de défense et de coopération militaire ?

Il est pour le moins surprenant que, traversant deux pays dans lesquels la France possède des bases, cette question n’est même été évoquée. Attend-il la prochaine crise pour se poser cette question, que l’on ne peut pourtant traiter sérieusement que par temps calme ? Faut-il vraiment axer notre politique de coopération sur la gestion des migrations, en généralisant à grande échelle des programmes qui n’ont donné jusqu’ici que de très modestes résultats ? Est-il raisonnable d’envisager d’élever encore la prime de retour, qui s’élève déjà à sept mille euros par migrant candidat, pour parvenir à se débarrasser absolument d’Africains jugés encombrants ?

En matière de politique africaine, Nicolas Sarkozy a déjà commis un grave un faux départ.
Deux, et c’est l’élimination dans la course à l’influence. Les diplomaties américaine, chinoise, britannique ou indienne n’ont jamais connu de tels dérapages. Les échéances sont désormais rapprochées. Le vote du budget en dira long sur la sincérité des fragments humanistes qui subsistent dans les discours présidentiels. La négociation des Accords de partenariat économiques aussi. Les pays en développement ont besoin d’un délai, d’équilibre et de
concessions. L’idée d’une ouverture commerciale asymétrique doit être défendue, alors que les quelques acquis (accords « Tous sauf les armes », AGOA américain) sont menacés par l’érosion des préférences accordées aux pays ACP. On en attend aussi davantage sur l’accompagnement des processus électoraux : la France devra faire preuve de modestie et de doigté au Togo et en Côte d’Ivoire, pays où la diplomatie chiraquienne s’est déconsidérée, mettant en danger les ressortissants français dans ces pays. Enfin, on souhaiterait que la politique française en Afrique soit plus transparente, débattue à l’Assemblée nationale, offerte aux citoyens… Est-il normal que nombre de clauses des accords de défense et de coopération militaire soient encore inaccessibles mêmes aux membres des commissions des affaires étrangères et de la défense des assemblées? Les socialistes sont prêts à participer à leur examen et plus généralement à la normalisation de la politique africaine de la France.

L’Afrique ne peut plus être le seul jouet du Président et de sa cellule rapprochée. On en a déjà mesuré les conséquences avec le discours de Dakar et cette situation devient de plus en plus difficile à tolérer.

par Thomas Mélonio
Délégué national du parti socialiste pour l’Afrique

samedi 25 août 2007

Afrique • L' homophobie a le vent en poupe

Perçue généralement comme une aberration en Afrique, l'homosexualité est violemment réprimée dans beaucoup d’états de ce continent.
Ainsi, au Nigeria 18 homosexuels risquent-ils la peine de mort.

Carte avec localisaton du Nigeria en Afrique

Le procès des 18 homosexuels vient de s'ouvrir devant une cour islamique de l'État de Bauchi. L'un des États de la Fédération nigériane où la charia est en vigueur et son application plus stricte depuis une dizaine d'années.

Le Nigeria compte 36 États qui disposent d'une grande autonomie en matière législative. La charia est appliquée dans la totalité des États du nord de la Fédération. Ils sont à majorité musulmane. Mais ce durcissement n’est pas propre aux seules zones musulmanes. Un projet de loi vise à interdire les unions homosexuelles, qui de toute façon n’ont pas de statut légal, et à punir ceux qui aident et encouragent gays et lesbiennes.

Si jamais ces jeunes hommes nigérians sont comdamnés pour sodomie, ils risquent la peine de mort par lapidation. Pour l’instant, et faute de témoins, ils ne sont «que» poursuivis pour «vagabondage» et «fainéantise», ce qui pourrait leur valoir un an de prison ou 30 coups de fouet.
Ils avaient été interpellés par la police le 8 août à Bauchi, trois jours après une cérémonie de mariage homosexuel durant laquelle ils s’étaient déguisés en femmes, portant soutiens-gorge, boucles d’oreilles, etc.

"Kiss-in" de soutien organisé devant l'ambassade du Nigéria à Paris par Act-Up

Les accusés, âgés de 18 à 22 ans, ont tous nié l’accusation de travestissement et d’homosexualité: ils ont expliqué s’être rendus à une fête de fin d’année pour célébrer l’obtention de leur diplôme. Cinq d’entre eux ont été libérés hier sous caution en attendant la reprise du procès. Les 13 autres ne pouvaient pas payer les 20.000 nairas (108 euros) demandés. A leur sortie du tribunal, en fourgon carcéral blindé, ils ont reçu des pierres lancées par une petite foule composée de femmes et de jeunes gens.

Dans toute l’Afrique, l’homophobie est en nette recrudescence.

En mai, lors de la première conférence de l’Ilga (International Gay and Lesbian Association), l’organisation faisait remarquer que 38 des 85 pays interdisant l’homosexualité se trouvaient en Afrique.

L’année dernière, la presse camerounaise avait «dévoilé» de façon nauséabonde des listes supposées d’homosexuels, déchaînant un tollé dans l’opinion publique à leur encontre. Peu de temps auparavant, l'évêque de Yaoundé, Tonye Bakot, avait à son tour fustigé les homosexuels dans une longue homélie.
Maitre Alice Nkom, avocate au barreau de Douala, a pris vigoureusement la défense de 11 homosexuels présumés, arrêtés en juin 2005 dans un bar de Yaoundé, et emprisonnés pendant plus d'un an dans des conditions sordides. L’un d’eux malade et violé en prison, Alim Momgoche, décéder du Sida dix jours après sa libération en juin 2006.
Une autre affaire camerounaise récente concerne six jeunes hommes accusés d'homosexualité et emprisonnés le 1er août dernier dans une prison de Douala après avoir été retenus plus de 10 jours dans un commissariat du nord de la capitale.
Ces jeunes gens sont placés en détention provisoire pour six mois, officiellement "pour les besoins de l'enquête".

Alice Nkom et Alim Momgoche

Interrogée sur RFI, le 21 aôut, maître Nkom dit son inquiétude aussi bien sur le sort des 18 jeunes nigérians que sur les prétextes fallacieux mis en avant par la police et la justice camerounaises pour l'arrestation de ces six camerounais.



L'Ouganda réprime l'homosexualité masculine par la loi, à partir d'une législation introduite par la colonisation britannique au dix-neuvième siècle, qui peut conduire les personnes arrêtées à des peines d'emprisonnement à vie.
Les gays et les lesbiennes sont sujets à des violences homophobes émanant de bandes qui sévicent particulièrement dans les zones rurales où vit la majorité de la population.
Les organisations de défense des droits de l'Homme dénoncent régulièrement la passivité –voire la complicité- des autorités qui ne mettent pas fin à ces actions hors-la-loi.

Manifestation à Londres (été 2006) contre la dictature de Mugabe

Au Zimbabwe, le dictateur Robert Mugabe ne perd jamais une occasion de dénoncer le lobby homosexuel occidental, censé militer contre lui. Il a plusieurs fois traité les homosexuels de sous-humains « valant moins que les porc et les chiens ».


Gay Parade à Johannesbourg en septembre 2006

Même en Afrique du Sud, seul pays du continent à autoriser les mariages gays, les meurtres de lesbiennes sont chose courante, comme le dénonçait récemment Human Rights Watch.



Pour être un "véritable" Africain

Les homosexuels n’ont jamais eu de chance : sous le colonialisme, être un bon Africain c’était croire en Dieu et donc condamner sans réserve Sodome. Sous les régimes marxistes, le bon citoyen africain devait fuir l’homosexualité, celle-ci étant vue comme une déviation propre à la bourgeoisie, une conséquence de la décadence capitaliste.
Les adversaires de l’homosexualité en Afrique expliquent leur hostilité par des raisons essentiellement religieuses et culturelles, affirmant que les relations entre personnes du même sexe sont dénoncées dans le Bible ou le Coran et qu’elles n’ont jamais existé dans la société africaine pré-coloniale.

Les experts religieux des deux camps poursuivent d’ailleurs leur polémique, parfois animée, sur l’interprétation correcte des références scripturales concernant l’homosexualité.Des recherches récemment entreprises par des experts africains et du Nord contestent, toutefois, l’affirmation selon laquelle l’homosexualité en Afrique est une importation du colonialisme. Des recherches menées parmi les populations Gikuyu de la région de Murang’a, dans le centre du Kenya, par Wairimu Ngaruiya Njambi et William O’Brien indiquent que le mariage "femme-femme" était généralement bien accepté lorsque ces relations permettaient d’amener des enfants dans les foyers ou d’apaiser les différends en matière de droits de succession foncière ou autres biens. D’autres recherches ont permis de découvrir des pratiques homosexuelles et bisexuelles traditionnelles chez les hommes de certaines cultures africaines, ainsi que des mots pour désigner l’homosexualité, les homosexuels et les lesbiennes, dans un grand nombre de langues vernaculaires.

vendredi 24 août 2007

Texas • Peine de mort : Les 400 coups

Pour la 400e fois en 30 ans, l'Etat du Texas a procédé à l'exécution d'un prisonnier. Âgé de 32 ans, Johnny Ray Conner a subi le châtiment suprême pour un meurtre commis lors d'un braquage. Au même moment, trois meurtriers étaient pendus au Japon.


Johnny Conner, 32 ans, a été exécuté au Texas le 22 août 2007 pour le meurtre d'une employée vietnamienne de l'épicerie âgée de 49 ans, Kathyanna Nguyen, du braquage d'une épicerie. Un crime pour lequel il a toujours clamé son innocence. C'est la quatre centième exécution dans cet Etat depuis le rétablissement de la peine de mort aux Etats-Unis en 1976, et dans cet Etat en 1982.

Le condamné a demandé pardon à plusieurs reprises et exprimé son amour à sa famille et à la famille de sa victime, qui ont assisté à l'exécution à travers des vitres mercredi soir. "C'est le destin. C'est la vie. C'est quelque chose qu'Allah veut que je fasse", a-t-il dit. "Je ne suis pas furieux contre vous. Quand j'atteindrai les portes du paradis, je vous attendrai. S'il vous plaît, pardonnez-moi."

Reconnu coupable en moins d’une heure

"Ce qui m'arrive est injuste et le système n'est pas bon", a encore dit Conner qui a parlé jusqu'à ce que les substances létales fassent leur effet. Son décès a été prononcé à 18h20 locales, soit huit minutes après le début des injections. Il avait fallu moins d'une heure au jury pour le reconnaître coupable du meurtre, le 17 mai 1998. Et en moins de cinq heures, la condamnation était tombée: peine de mort.

Les avocats de Conner se sont vu refuser mercredi matin une procédure d'appel auprès de la Cour Suprême des Etats-Unis pour empêcher l'exécution. Ils arguaient que les conseils qui le défendaient lors de son premier procès n'avaient pas enquêté sur une blessure à la jambe dont le condamné avait souffert et qui excluait toute possibilité de fuite.

Appel de l’Union Européenne

Johnny Ray Conner est le 21e condamné à mort à être exécuté cette année au Texas. La semaine prochaine, trois exécutions sont programmées.
Cette 400e exécution au Texas en 25 ans a provoqué l'indignation des opposants.

L'Union européenne, qui est opposée à la peine capitale et interdit ce châtiment dans ses 27 pays membres, a demandé au gouverneur du Texas Rick Perry de ne pas exécuter Johnny Ray Conner et de décréter un moratoire sur la peine de mort.

Le porte-parole du gouverneur Robert Black a balayé les critiques en déclarant : "Il y a 230 ans, nos ancêtres ont combattu pour se libérer du joug d'un monarque européen et gagner la liberté de l'autodétermination. Les Texans ont décidé il y a longtemps que la peine de mort était un châtiment juste et approprié pour les crimes les plus horribles commis contre nos citoyens. Bien que nous respections nos amis en Europe, saluons leurs investissements dans notre État et apprécions leur intérêt pour nos lois, les Texans arrivent très bien à gouverner leur État."

Selon le Death Penalty Information Center, les Etats-Unis ont exécuté 1091 personnes depuis 1976.
Le Texas revendique à lui seul 40% des exécutions aux Etats-Unis. Il reste 379 condamnés qui attendent leur exécution dans les geôles texanes. Aux Etats-Unis, trente-huit des cinquante Etats fédérés américains ont repris cette pratique après une brève suspension dans les années 1970. Pour autant, seul une quinzaine d'Etats (Texas, Virginie, Floride, Californie...) l'appliquent régulièrement. L'opinion publique américaine y reste foncièrement attachée.

Trois exécutions au Japon avant un remaniement ministériel

Dans le même temps, au Japon, trois meurtriers sexagénaires condamnés à la peine capitale ont été pendus. Ces exécutions, qui ont eu lieu le jeudi 23 août au matin, portent à dix le nombre de prisonniers exécutés depuis que Shinzo Abe est devenu Premier ministre en septembre.
Il est courant au Japon que des condamnés soient pendus juste avant un changement de gouvernement et la nomination d'un nouveau ministre de la Justice. Un remaniement ministériel est attendu lundi 27 août...

Cent trois autres condamnés attendent toujours l'exécution de leur peine dans les couloirs de la mort. En tout, ce sont 69 pays dans le monde qui maintiennent cette peine, au premier rang desquels la Chine, l'Irak, l'Iran, le Pakistan, le Soudan et les Etats-Unis...

à consulter : http://www.abolition.fr

jeudi 23 août 2007

AMÉRIQUE LATINE • Vive la résistance !

En Argentine, on commémore les trente-cinq ans du soulèvement de la prison de Trelew. Au Mexique, les zapatistes installent la première réserve écologique indienne du pays. L'esprit de résistance n'a pas de frontières.

Les zapatistes résistent encore et toujours dans l'Etat du Chiapas, au Mexique, et ce, même si, depuis un certain temps, on les a un peu oubliés. La Jornada, un quotidien très à gauche, explique que leur dernier combat est écologique. Dans la banlieue de San Cristobal de las Casas, une des principales villes de l'Etat du Chiapas, ils ont créé la première réserve écologique indienne et autonome du pays.

Il s'agit en fait de "geler" des terres qui, sinon, auraient été englouties par le développement de la ville. Mais évidemment, nos zapatistes n'ont pas choisi n'importe quel bout de terre. Non, ils ont pris soin d'installer leur campement non loin d'une usine Coca-Cola qui – disent-ils – pompe allègrement des millions de litres d'eau dans une rivière toute proche. Sans compter que c'est dans cette banlieue que se sont installés les notables de la ville, avec villas et jardins somptueux.

Dès lors, la réserve écologique indienne avec ses tentes, sa musique, ses allées et venues permanentes, ses meetings fait un peu désordre dans l'arrière-cour de Coca-Cola et à deux pas des gazons impeccablement entretenus de la bourgeoisie locale. Et c'est précisément pour cela que les zapatistes (voir photo zapatistes au Chiapas) ont installé leur réserve à cet endroit : à savoir pour gêner. Sans violence bien sûr, ce qui est encore pire puisqu'on ne peut rien reprocher à ces maudits écolo-zapatistes.


On ne résiste pas seulement au Mexique. On résiste aussi aux Etats-Unis. C'est le Los Angeles Times qui revient cette fois sur l'histoire d'Elvira Arellano, une jeune Mexicaine de 32 ans, mère d'un enfant de 8 ans (voir photo). Mais surtout, Elvira est devenue en un an le symbole même du problème de l'immigration clandestine aux Etats-Unis. En fait, il y a un an, elle a failli être renvoyée au Mexique sans son fils. Tout simplement parce que lui est né aux Etats-Unis et qu'il est donc inexpulsable. Pour éviter cette situation, Elvira Arellano s'est réfugiée dans une église méthodiste de son quartier à Chicago. Comme au Moyen Age lorsque les églises servaient de refuge inviolable ou comme en France, il n'y a pas si longtemps, dans l'affaire de l'église Saint-Bernard. Le pasteur de la paroisse, Walter Coleman, n'a pas hésité un instant à la recueillir avec son fils.

Mais depuis un an, la situation est bloquée. D'autant qu'Elvira ne s'est pas contentée de camper dans le temple méthodiste. Elle a aussi multiplié les interventions dans les églises partout dans le pays, et, toujours accompagnée de son fils, plaidant inlassablement pour une réforme de la loi sur l'immigration et la régularisation des 12 millions de clandestins qui vivent aux Etats-Unis.

Avant-hier, elle était à Los Angeles. Son fils de 8 ans l'accompagnait et elle sortait d'une église, catholique cette fois. A peine sortie, deux voitures de police se sont arrêtées près d'elle et l'ont tout bonnement emmenée. Elvira a juste eu le temps de calmer son fils et de le confier aux bons soins des amis qui l'accompagnaient. Aujourd'hui, Elvira a été expulsée vers le Mexique. Son fils a été recueilli par le pasteur de Chicago en attendant un hypothétique retour de sa mère. Le Los Angeles Times rappelle qu'il y a plus de 3 millions d'enfants nés aux Etats-Unis dont un des parents est sans papiers, donc expulsable comme Elvira. Mais il y a aussi des milliers d'Américains qui résistent – souvent par le biais de leurs églises – et qui cachent et aident des familles de sans-papiers.

Enfin, il y a des actes de résistance qui ont marqué l'Histoire… Comme en Argentine, où l'on commémore ces jours-ci les 35 ans du massacre de Trelew, une ville en Patagonie et aussi une prison fédérale où, de 1970 à 1983, les juntes successives ont enfermé des prisonniers politiques. Le quotidien argentin Pagina 12 revient sur ce 15 août 1972, le jour où 120 prisonniers de Trelew se sont mutinés et ont pris le contrôle de la prison. Malheureusement, le plan a échoué et seuls 25 prisonniers ont réussi à prendre la fuite. Sur ces 25, 6 seulement ont réussi à s'enfuir pour le Chili de Salvador Allende – nous étions en 1972.

Les 19 autres ont tous été conduits sur une base navale, la base Almirante Zar,
et ont été fusillés le 22 août 1972. Pour honorer leur mémoire, 300 anciens détenus de la prison de Trelew feront demain le déplacement et reviendront pour la première fois sur les lieux de leur détention. Leur message est clair : entre 1970 et 1983 de 10 000 à 12 000 prisonniers politiques sont passés par les prisons argentines et ceux qui en ont réchappé, mais aussi l'ensemble du peuple argentin, ne doivent pas oublier les 19 fusillés de Trelew. Parce que, comme le souligne un des rescapés de cette prison sinistre : "Nous avons tenu parce que, malgré nos différences politiques, nous étions tous des frères. Et aujourd'hui, nous voulons montrer à tous que seul la solidarité et la dignité nous ont permis de résister encore et encore à ce régime de destruction."

mercredi 22 août 2007

Lettre de Jordanie


Dépourvu de couvre chef mais protégé de lunettes de play boy, Ramzi grimpe avec la vivacité d’un bouc de troupeau de chèvres bédouines les huit cent marches qui conduisent au Monastère. Derrière notre guide bien aimé je masque ma peine d’un sourire malentendu en compagnie d’un authentique alpiniste qui trouve sincèrement l’effort déjà significatif : le reste du troupeau, pardon du groupe de touristes, s’égrène tout au long des saintes marches. Certains ont renoncé à l’ascension, d’autres ont même abandonné en cours d’effort ; dommage car le second Trésor du site de Pétra vaut toutes les marches du monde. La pérégrination sur les onze kilomètres, en passant par la gorge du Siq (voir photo) de cette double merveille s’avère une nécessité pour tous les humains, à peine sportifs ou spirituels, mais soucieux de ne pas quitter notre si sympathique vallée trop souvent larmoyante sans avoir vu la Ville Rose du désert.

La réputation de Petra m’était connue, et ma réservation acquittée, quand la publicité pourtant décriée car issue d’un classement assez confus des « Merveilles du Monde » trois jours avant mon départ, m’est apparue comme un signe favorable : superstition de touriste naïf et désœuvré ? Double merveille dis-je si l’on considère la magnifique façade de Khazneh (voir photo) comme le premier Trésor officiel et aperçu ; ou alors, et surtout, si l’on comprend que toute cette magnificence vient du double mouvement de la main de l’homme posée à flanc de montagne et du travail de la nature génératrice de véritables formes artistiques. Je n’oublierai jamais l’imprenable vue de mon regard incrédule, cherchant depuis la chambre d’hôtel à fixer pour l’éternité deux collines ouvrant sur le désert. Fixation vaine mais familière pour moi, qui ne photographie plus, depuis si longtemps.

Néanmoins Petra (1) n’est pas toute la Jordanie, pas plus que Amman d’ailleurs qui concentre un tiers des habitants dans une gigantesque foire à la construction immobilière.

Jerash et Umm Queis (l’ex Gadara) offrent les séductions des ruines antiques, gréco-romaines obligent, avec colonnes et places, hippodrome (petit, assurent les spécialistes mais bien mieux conservé que celui d’Istanbul : j’ai joué à Ben Hur, sans aucun char, sous les yeux amusés de Ramzi et de quelques autres), arc romain donc (Hadrien, je crois) et deux beaux cirques très évocateurs pour l’amateur de théâtre que je suis.

Kerak et le Wadi Mujib s’imposent comme des morceaux de choix sur la Route des Rois. Le premier offre l’imaginaire des célèbres châteaux du temps des croisades : je fus plus impressionné encore par l’intérieur, sombre et inquiétant à souhait. Et quand le car s’est arrêté en haut des contreforts de la vallée du Wadi Mujib je suis resté muettement persuadé de contempler ce que la nature, si ce n’est quelque Dieu, avait créé de plus beau. Non comptés les êtres vivants...naturellement ! Il me paraît inutile d’en dire plus.

Le Dieu de mes père et mère a trouvé son content d’histoire biblique et de légende sulpicienne avec le Mont Nébo (du haut duquel j’ai pu téléphoner avec le portable de Ramzi ; j’avais échoué depuis la chambre d’hôtel…), la statue de sel de la femme de Loth (ignorants de catéchisme s’abstenir, ou se renseigner !), le ruisseau du Jourdain (en l’absence de Jésus et Jean-Baptiste j’ai honteusement raflé une demi bouteille d’eau pour porter à mes parents) dans lequel on peut chercher à voir un symbole du dramatique et crucial problème de l’eau, et la Mer morte (où j’ai certes flotté comme une baudruche, mais que j’ai quittée précipitamment à la première goutte de sel…dans l’œil !). (voir photo)


Pas d’Arabie sans désert, pas de Jordanie (qui n’est autre que l’Arabie du nord ouest) sans le Wadi Rum où, faute de Lawrence ( dois-je vraiment ajouter…d’Arabie ?) et de patrouille du désert, nous nous sommes rabattus sur de très approximatifs quatre-quatre pour une petite randonnée de près de trois heures à travers dunes et sables (on y trouve d’admirables arches naturelles), avant de déguster le plat du jour sous tente bédouine.

Un dernier mot sur le golfe d’Aqaba où nous avons pu croiser à bord d’un superbe bateau, revendu par tel prince arabe à des sociétés de tourisme, et rassembler enfin, mais du seul regard, trois pays splendides chargés d’histoire et de conflits : Egypte, Israël et Jordanie. Trois qui donnent quatre si la Palestine vient enfin à se fonder de jure. Gageons que les relations récentes plus détendues entre ces trois là préfigurent une réunion au sommet à trois ou quatre, peut-être moins prient certains : Yahvé, Allah et Jésus, sans oublier notre humble maîtresse à tous, Dame Raison. Et rêvons une fois pour toutes que les blanches colombes soient désormais les seuls émissaires de Petra la Rose et autres lieux.

Bernard Auroux

(1) Pétra (de πέτρα petra, « rocher » en grec ancien ; البتراء Al-Butrāʾ en arabe, de son nom sémitique Reqem ou Raqmu (« la Bariolée »)

mardi 21 août 2007

IRAK • Kouchner au secours de Bush?

Arrivé dimanche en Irak, M. Kouchner a été reçu lundi par le président Jalal Talabani et a rencontré d'autres responsables irakiens. Il a souhaité que les différentes communautés irakiennes soient associées à la lutte contre la violence, plaidant également pour une participation accrue des Nations unies. C'est le premier voyage d'un haut responsable gouvernemental français depuis l'intervention américaine en 2003.

Le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner a rappelé mardi depuis Bagdad l'indépendance de la politique française sur l'Irak vis-à-vis des Etats-Unis et affirmé que les Irakiens avaient réservé un "accueil merveilleux" à la délégation française.

"Nous ne sommes pas passés par les Américains" pour ce voyage, a soutenu le chef de la diplomatie française sur RTL, expliquant qu'il avait "prévenu quelques heures avant Mme (Condoleezza) Rice" de sa visite, au même titre que le ministre Allemand des affaires étrangères ou la présidence portugaise de l'Union europénne.

"Il fallait être là", a-t-il plaidé, témoignant de "l'accueil merveilleux" des Irakiens, qui "attendent quelque chose" de la France.
"Tout le monde sait que les Américains ne pourront pas sortir ce pays de la difficulté tous seuls", a-t-il ajouté.

"Avant, il y avait une attitude qui consistait à dire: 'Circulez, il n'y a rien à voir'. C'est tellement compliqué, c'est tellement fichu d'avance qu'il ne faut plus s'en occuper. Eh bien, ce n'est pas l'attitude de la France", a-t-il déclaré, expliquant qu'il avait rencontré "toutes les composantes de la société irakienne" en vue de "comprendre et présenter éventuellement une participation".
"Nous nous rendons mal compte, vu de loin, de ce qui va se passer ici", a par ailleurs estimé M. Kouchner, évoquant les affrontements communautaires qui ensanglantent l'Irak. "Je crois vraiment qu'en fonction de ce qui va se jouer ici, le monde sera changé... et nous devons en être."


Le voyage qui ramène la France dans le marigot atlantiste


Hassane Zerrouky (journal L'humanité)


Extraits de l'article du 21 août

"Que peut-on faire pour vous aider en Irak" glissait Bernard Kouchner à Condoleeza Rice lors de sa visite en France en juillet. Ces propos rapportés par le Canard Enchaîné du 4 juillet, montrent si besoins est que la visite du chef de la diplomatie française ne constituait nullement une surprise.....

...Pour le président Bush et les néoconservateurs américains, la visite de Kouchner en Irak est pain béni: elle permet à la Maison-Blanche, de plus en plus isolée au plan interne sur le dossier irakien, d'exorciser ses démons. Elle donne du crédit aux commanditaires d'une guerre qui restent convaincus , en dépit de l'enlisement US en Irak qu'il est encore possible de la gagner au nom des valeurs occidentales.

Certes, pour le ministre des Affaires étrangères français, ce coup d'éclat permet d'effacer le fait qu'il ait été tenu à l'écart des infirmières bulgares et de redorer son blason. Mais, plus généralement, il s'inscrit en droite ligne des convictions qu'il a de tout temps mis en avant.

En effet, sa vision de l'intervention au nom du droit d'ingérence humanitaire n'est au fond pas si éloignée de celle développée par George W. Bush au nom de la défense de la morale chrétienne conservatrice.


Jean-Pierre Chevènement : "un alignement de la France sur la politique sur la politique américaine"

Le voyage de Bernard Kouchner en Irak est "totalement inopportun", dénonce lundi l'ancien ministre socialiste Jean-Pierre Chevènement, qui estime qu'une semaine après la visite de Nicolas Sarkozy dans la propriété des Bush à Kennebunkport, la visite à Bagdad du ministre français des Affaires étrangères "vient témoigner de l'alignement de la France" sur la politique américaine. "Je trouve que cette visite de M. Kouchner à Bagdad apparaît comme un voyage à Canossa, quand les empereurs venaient, repentants, à genoux dans la neige, confesser leurs fautes au pape", a critiqué l'ancien député-maire du Territoire de Belfort sur Europe-1.

"On a l'impression, huit jours après la visite de M. Sarkozy à M. Bush, que M. Kouchner vient témoigner de l'alignement de la France. Disons que le bénéfice du non-alignement de la France sur la politique américaine au moment de l'invasion de l'Irak est gaspillé", a encore estimé celui qui avait démissionné en 1991 de son poste de ministre de la Défense pour protester contre l'engagement de Paris au côté de Washington dans la guerre du Golfe.

En 2003, "la France avait acquis aux yeux du monde arabe et du monde musulman une certaine stature et là, nous retombons lourdement du côté de ceux qui ont plus ou moins soutenu cette équipée", a-t-il poursuivi, après avoir souligné que "ce n'était pas le moment pour la France de faire ce geste (...) important", le jugeant "totalement inopportun".

La quadruple attaque aux camions piégés, mardi dans le nord du pays, fait de celle ci l'attentat le plus meurtrier depuis le renversement de Saddam Hussein en 2003.



Noël Mamère traite Kouchner de "petit caniche" des Etats-Unis

Noël Mamère, député des Verts, a affirmé mardi 21 août à propos de la visite de Bernard Kouchner en Irak que "la France se comporte comme un petit caniche" à l'égard des Etats-Unis."

"L'arrivée de Bernard Kouchner à Bagdad, si peu de temps après la rencontre entre Bush et Sarkozy est un signe envoyé aux Etats-Unis, qui est le signe de la soumission", a-t-il dit sur RTL.
Selon lui, "dans cette circonstance, la France se comporte comme un petit caniche".
"C'est une manière de se salir les mains que d'aller à Bagdad après la visite de Sarkozy chez Bush. C'est une manière de cautionner la politique américaine en Irak", a-t-il dit.

Il a en outre dénoncé l'"imposture" de Nicolas Sarkozy de vouloir faire croire aux Français que la France, à elle toute seule, va pouvoir régler le problème irakien".

Des blessés à l'hôpital de Dohuk le 15 août, au lendemain des attentats dans des villages kurdes yézidis du nord de l'Irak