jeudi 17 janvier 2008

Polémique sur la laïcité après les propos de Sarkozy sur la religion

Alors que le président de la République présente, ce jeudi, ses voeux aux représentants des religions, ses propos tenus à Rome puis à Ryad sur l'héritage "civilisateur" des religions créent la controverse. François Hollande l'accuse d'avoir "fait de la religion un instrument de promotion commerciale des produits français".

François Hollande (Reuters)
N
icolas Sarkozy a "fait de la religion un instrument de promotion commerciale des produits français", lors de sa visite en Arabie saoudite, c'est ce qu'a déclaré François Hollande, Premier secrétaire du PS, mercredi 16 janvier, alors que le président de la République doit présenter, ce jeudi, ses vœux aux représentants des différentes religions.
Ces déclarations interviennent alors que la polémique se fait grandissante sur la place que le chef de l'Etat réserve à la religion dans la société et sa conception de la laïcité.
François Hollande juge que le président de la République, dans son discours à Ryad, "n'est plus du tout sur la loi de 1905. On est dans un champ idéologique qui fait de la religion un instrument de promotion commerciale des produits français". Il cite, en outre, la volonté du président de vendre "aux pays musulmans des centrales nucléaires civiles". "On n'a pas à venir à Ryad pour défendre une conception de la religion. On n'a pas besoin de donner un label, une distinction de la bonne utilisation de la religion, surtout en Arabie saoudite", juge-t-il.

"Propos intolérables"

Le député PS Jean-Marie Le Guen a dénoncé mardi les propos "dangereux de Nicolas Sarkozy sur la religion en Arabie Saoudite" qui, selon lui, "renforcent la légitimité de ceux qui prêchent en faveur de la foi la plus radicale et la plus absolutiste".
De son côté, la FSU a dénoncé les "propos intolérables" de Nicolas Sarkozy sur la religion, estimant qu'il s'agissait d'"attaques contre le caractère laïque de la République", dans un communiqué mercredi. En outre, le Comité national d'action laïque (Cnal) a souhaité mercredi "pour 2008 une année laïque au président de la République", reprochant à Nicolas Sarkozy ses propos tenus sur la chrétienté et la religion, fin 2007, à Rome, puis en Arabie saoudite lundi. A l'Assemblée, le député socialiste Jean Glavany s'est aussi indigné du discours prononcé cette semaine à Ryad par le chef de l'Etat, "un discours où Dieu n'est plus cité à chaque page... mais à chaque ligne, créant désormais un problème de fond dans la République".

"Ouvrir la boîte de Pandore"

A droite aussi, les propos du chef de l'Etat ne laisse pas indifférent. Dans un entretien à l'Express, François Bayrou estime que "remettre en cause le principe de la laïcité, c'est ouvrir la boîte de Pandore". Par ailleurs, se refusant à commenter directement les deux récents discours de Nicolas Sarkozy à Rome et Ryad, Jean-Louis Debré, président du Conseil constitutionnel, à toutefois affirmé que "la laïcité est un élément essentiel de la République, c'est l'un des piliers de la République, cette séparation entre les églises et l'Etat et ce fait que l'Etat ne s'implique pas dans la vie des différentes églises, mais aussi que l'Etat, s'il veut aider à la prise en compte du fait religieux, le fait à égalité vis-à-vis de toutes ces églises"

Wauquiez défend la "laicité positive"

Le porte-parole du gouvernement, Laurent Wauquiez, a pour sa part estimé que "le discours du président là-dessus s'insère parfaitement dans la tradition d'une laïcité française qui n'est pas une laïcité de combat ou une laïcité de rejet de la place de la religion dans la société, mais au contraire une laïcité d'égal respect entre les différentes convictions". De même, Michèle Alliot-Marie, ministre des Cultes est venu défendre les propos du président affirmant :"nous souhaitons reconnaître le rôle de la spiritualité, de toutes les spiritualités, sous toutes leurs formes. Les Français y sont très attachés", a-t-elle dit.
"Nous voulons aider toutes les spiritualités à s'exprimer, y compris celles fondées sur l'athéisme", a-t-elle déclaré à l'Assemblée sous les huées de la gauche.

Les propos de Sarkozy

Nicolas Sarkozy devrait revenir jeudi, lors de ses voeux aux corps religieux, sur la place de choix qu'il réserve à la religion dans la société et sur sa conception de la laïcité, dans la foulée de deux discours très polémiques prononcés à Rome puis Ryad.
Après avoir vanté le mois dernier devant des dignitaires de l'Eglise catholique les "racines chrétiennes de la France", le président français a une nouvelle fois exalté lundi l'héritage "civilisateur" des religions, cette fois en Arabie saoudite devant des dignitaires du très rigoriste régime saoudien, à chaque fois dans des termes inédits pour le chef d'un Etat laïque.
En recevant le 20 décembre le titre de chanoine honoraire de l'église romaine de Saint-Jean de Latran, Nicolas Sarkozy a donc pris ses distances avec la conception de la "laïcité à la française", incarnée par la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat.
Insistant sur les "racines chrétiennes de la France", le président lui a clairement préféré une laïcité dite "positive", c'est-à-dire "qui, tout en veillant à la liberté de penser, à celle de croire et de ne pas croire, ne considère pas les religions comme un danger, mais un atout".

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