note d’espoir de Clotaire T-L, Douala, Cameroun
Les Africains ont jubilé avec la victoire d’Obama. Je suis l’un d’eux. Après une nuit sans fermer l’œil dans la pénombre irréelle de l'aube, des larmes ont jailli de mes yeux quand il a prononcé son discours de victoire. Moi aussi j’avais gagné. Le bonheur m’avait déjà envahi quand Nelson Mandela avait été libéré et que le nouvel homme d’État allait consolider un chemin de dignité pour l’Afrique.
Dans la nuit du 5 novembre 2008, le nouveau président nord-américain n'était pas seulement un homme qui parlait, c'était la voix étouffée de l'espérance qui se dressait à nouveau, libre, en chacun de nous. Mon cœur avait voté. Habitué à demander peu, je fêtais une victoire démesurée. Quand je suis sorti dans la rue, ma ville s'était comme transportée à Chicago, Noirs et Blancs respirant, communiant dans un même étonnement de bonheur. Car la victoire d’Obama n'était pas la victoire dune « race » sur une autre : sans la participation massive des Américains de toutes les couleurs, y compris de la majorité blanche, les États-Unis d'Amérique ne nous auraient pas donné cette raison de tant espérer.
Dans les jours qui ont suivi cette victoire, j'ai entendu les réactions euphoriques venant des quatre coins de notre continent, des personnes anonymes, de simples citoyens voulaient témoigner de leur bonheur. En même temps, j’ai pris note, avec une certaine réserve, des messages de solidarité des dirigeants africains qui presque tous appelaient Obama « notre frère ». Tous ces dirigeants étaient-ils vraiment sincères ? Obama est-il apparenté à tant de gens politiquement si divers ? J'ai quelques doutes dans notre fébrilité à ne voir des préjugés que chez les autres, nous ne sommes pas capables en effet de voir nos propres sentiments racistes et nos xénophobies. Dans notre urgence à condamner l'Occident, nous oublions d'accepter les leçons qui nous parviennent de l'autre côté du monde.
Si Obama était africain, un de ses concurrents mettrait en place une modification de la Constitution pour prolonger son mandat au-delà du terme prévu pour le sien et notre Obama devrait attendre encore de longues années pour pouvoir à nouveau se porter candidat. Si nous tenons en effet compte de la permanence au pouvoir en Afrique d'un même président, cela ne représente rien moins que 41 ans au Gabon, 39 ans en Libye, 28 ans au Zimbabwe, 28 ans en Angola, 27 ans en Egypte, 26 ans au Cameroun… Bref, une quinzaine de présidents au pouvoir sur notre continent pendant plus de 20 années consécutives ! Mugabe, par exemple, aura 90 ans quand il terminera son mandat actuel. Mandat qu'il a imposé au mépris du verdict populaire !
Si Obama était africain, il est probable qu'il serait le candidat d'un parti d'opposition et n'aurait alors même pas la possibilité de faire campagne. Les choses se passeraient comme au Zimbabwe ou au Cameroun. Il serait agressé physiquement et harcelé psychologiquement, il pourrait être emprisonné et dans le même temps on lui retirerait son passeport. Les petits « Bush » africains ne tolèrent pas d'opposition, ne tolèrent pas la démocratie.
De tout ceci, la vérité c'est qu’Obama n'est pas africain, la vérité c'est que les Africains, les gens simples, les travailleurs anonymes ont commémoré de toute leur âme la victoire d’Obama. Mais je ne crois pas que les dictateurs et les corrompus d'Afrique aient le droit de s'inviter à cette fête. Le jour même où Obama a confirmé sa victoire dans les médias internationaux, les mauvaises nouvelles d'Afrique continuaient à s'amonceler : l'Afrique continuait à être victime de guerres, de mauvaises gestions, de l'ambition démesurée de politiciens cupides. Après avoir assassiné la politique, dans certains cas il ne reste que la guerre, dans d'autres l'abandon et le cynisme.
Il n’y a qu'une façon de célébrer la victoire d’Obama dans les pays africains, c'est en luttant pour que de nouveaux signes d'espoirs puissent naître ici sur notre continent, c'est en luttant pour que les Obama africains puissent aussi sortir vainqueurs et que nous Africains de toutes ethnies vainquions avec ces Obama-là et puissions célébrer chez nous ce que nous célébrons aujourd'hui chez les autres.
dimanche 4 janvier 2009
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire