Il y avait quelque chose d’Obama qui flottait dans l’air du temps américain, dans les conversations, à la Une des journaux, dans les émissions vedettes de la télé américaine. Non pas que l’élection soit déjà gagnée. Une élection n’est jamais gagnée d’avance. C’est dans le secret des urnes qu’elle va se décider. Mais, autre signe, les longues files d’attente qui, depuis plusieurs jours, se forment devant les bureaux de vote ouverts en anticipation, à l’occasion des "early votes", donnent la mesure de l’enthousiasme démocratique qui s’est emparé de ce pays. Un enthousiasme qui ne peut raisonnablement pas s’expliquer par le charisme de Mac Cain et de Sarah Palin. On pense même que plusieurs Etats-clés comme la Virginie, mais aussi l'Ohio, la Floride, le Colorado, la Pennsylvanie, devraient enregistrer cette année des taux de participation record, proches de 90% ! Il y a bien sur des incertitudes : le racisme qui pourrait fausser les résultats de sondages qui, jusqu’à hier, si l’on en croit le site spécialisé indépendant RealClearPolitics (RCP), qui réalise une moyenne des sondages publiés, accordait un avantage de plus de 6 points au candidat démocrate. Jamais dans l’histoire d’un pays, peuplé de plus de 85 % de blancs, un noir n’avait été en situation de remporter la présidentielle. Depuis l’Amérique a changé : Colin Powell et Condoleezza Rice ont occupé des charges de premier plan. De toute façon cette élection sera historique quelle qu'en soit l'issue. Dans un pays où les Noirs ne jouissent de leurs droits civiques que depuis un demi-siècle, le démocrate Barack Obama, né en août 1961, alors que les mariages interraciaux étaient interdits dans la majorité des Etats du "Vieux Sud", son score et peut-être sa victoire vont tourner une page de l’Amérique. C’est qu’avec son exceptionnel charisme Obama se présente comme le symbole vivant de l’unité d’un pays depuis toujours profondément divisé. Mais, il y a aussi son langage nouveau dans une Amérique qui n’a plus grand-chose à voir avec celle que prône le duo MacCain-Palin. Ceux là radotent sur le rêve américain alors que, comme le soulignait Sylvie Laurent, spécialiste de l’Amérique, "Barack Obama, lui, se présente comme quelqu'un qui a conquis son américanité à la force du poignet, incarnant la promesse d'ascension sociale offerte à tous. Mais il ose dire que le rêve américain est altéré, qu'il est devenu évanescent. Ce qui se délite, selon lui, c'est justement la possibilité d'ascension, les extraordinaires inégalités sociales la rendant impossible. Pour lui, le rêve est à construire, non à retrouver ".
Jean-Marcel Bouguereau
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